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L’oreille est une feuille de chou et tout ce qui
la frappe rompt le silence, de la nature si grand,
des forêts effrayant et de la nuit doux, Silence.
Les arbres. L’ombre. Clairière. Silence, celui
des aubépines aussi et des étoiles fixes, la frappe
et la met en mouvement et c’est alors le début
de mille changements, un chemin sonore où l’œil
rivalise avec l’oreille. Des bruits si variés qu’on doit
débrouiller et beaucoup de choses à déchiffrer
une à une comme une statue par exemple tombée
du ciel sans un son ou trouvée dans un buisson,
un mort vivant les yeux vides, la bouche cousue
et sans expression mais qui va à pas comptés
d’un point à l’autre, une expérience muette
et sans lendemain. Car quoi de plus incomplet
que le silence, il n’y en a ni entre les bruits
ni là où l’on croit, rien de plus trompeur qu’une
évidence, une belle illusion acoustique où on
entend des voix, celle du milieu qui impose sa loi,
celle de la raison, blanche ou des airs, le soir
tombait, un caillou, un hanneton, une mouche, la terre
Suzanne Doppelt, Amusements de mécanique